Florence MacCarthy (Flo), fille d'une Américaine divorcée, à la fois mondaine et stupide, qui parcourt les villes d'eau et de villégiature d'Europe comme les personnages de Henry James, n'a, dans son enfance, connu que la vie d'hôtel. Bien sûr, les hôtels ne sont pas sordides, et les amis, ou connaissances, de Bonnie, sa mère, appartiennent à la meilleure (ou presque) société. Mais, à Venise déjà, où le livre commence, à Cannes, puis à Paris, un nuage d'excentricité semble parfois envelopper la petite fille, l'adolescente, puis la jeune femme...
Ecrire sur la folie avec un mélange de sympathie et d'esprit, révéler les facultés de perception accrues des schizophrènes et leur inexorable logique de telle façon que le lecteur pénètre dans leur monde sans s'y noyer, voilà qui exige le goût et la technique d'un virtuose. Mavis Gallant a l'un et l'autre: style et dialogues brillants, scènes cruellement comiques. Ici, comme dans ses recueils de nouvelles, elle parvient, grâce à la texture même de sa prose, à construire les miradors d'où notre regard, à nous, lecteur, plonge dans de vertigineux abîmes socio-psychologiques.
Canadienne anglaise née à Montréal, Mavis Gallant est venue très jeune s'installer à Paris, où elle vit de sa plume depuis plus de trente ans. Elle a publié jusqu'à présent quatorze livres _ romans et recueils de nouvelles, pour la plupart _ dont six ont été traduits en français: Chronique de mai 68, Rue de Lille, Voyageurs en souffrance (Tierce-Deux-Temps, 1988 et 1992), les Quatre Saisons, l'Eté d'un célibataire et Voix perdues dans la neige (Fayard, 1989, 1990 et 1991).