Catherine Leher vient d'être engagée en qualité de gouvernante par une famille de Siciliens résidant à Rome et libérés des préjugés insulaires _ du moins en ce qui concerne le couple, car ce n'est pas tout à fait le cas du grand-père, Leopoldo. Celui-ci, en effet, tout en s'imposant d'accepter le mode de vie de ses enfants, a conservé ses principes austères. Aussi est-il très impressionné par Catherine, dont la droiture, la rigueur morale et la culture font l'admiration de tous. La famille comporte un quatrième élément: Jana, la bonne. Catherine, trouvant équivoque l'attitude de Jana à son égard, s'n ouvre à ses maîtres. De cette accusation naîtra la tragédie.
Ecrite en 1952, la Gouvernante, pièce dont Montale a relevé les accents tchékhoviens, fut immédiatement interdite par la censure italienne (elle ne sera jouée qu'en 1966). Brancati riposta par un essai, Retour à la censure, violent, agressif et sans concession, dans lequel il brocarde le climat obscurantiste de l'Italie des années cinquante, où, dit-il, " la haine de la culture a un bureau spécial, qui s'appelait naguère, avec une involontaire ironie, ministère de la Culture populaire, et qui se nomme aujourd'hui Sous-secrétariat au spectacle et à l'information ". Plus généralement, cet essai peut être considéré comme un manifeste particulièrement courageux et pertinent en faveur de la libre expression.
Vitaliano Brancati est né près de Catane, en Sicile, en 1907 et mort à Turin en 1954. Très admiré de Sciascia, qui a préfacé l'édition italienne de ses oeuvres complètes, il laisse une oeuvre d'ironiste, dont les Années perdues, le Vieux avec les bottes, Don Juan en Sicile, le Bel Antonio, Rêve de valse, etc.