" Brancati appartient par l'état-civil à une génération d'intellectuels qui passe du fascisme au marxisme et au communisme stalinien à travers la prise de conscience de ce qu'était, selon le diagnostic marxiste, la guerre civile espagnole, prodrome de la Seconde Guerre mondial; pourtant il s'en détache, chronologiquement, par une légère mais significative anticipation. Celle-ci lui permet de voir tout d'abord le fascisme non comme tragédie, mais comme " fait comique ", comme glorification du ridicule et obligation, pour les hommes, de s'y soumettre. Une sujétion au ridicule: tuant celui qui l'encourage comme celui qui le subit. A moins que celui qui le subit n'en soit délivré par un salutaire " manque de respect ". Comme Brancati, justement.
" En 1934, Pirandello, fasciste désormais sans illusions, publiait dans le Corriere la nouvelle Il y a quelqu'un qui rit: au cours d'une cérémonie indubitablement fasciste, une cérémonie du fascisme, de ses funestes solennités. Et tout se passe comme si Vitaliano Brancati en avait recueilli la consigne. "
Leonardo Sciascia
Vitaliano Brancati, né en 1907 près de Catane, en Sicile, est mort à Turin en 1954. Son oeuvre se compose principalement de romans et de nouvelles, parmi lesquels Don Juan en Sicile, le Bel Antonio, les Années perdues.