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Auteur de peintures souvent immenses qui décorent murs et voûtes dans des églises, des palais et des villas, vite célèbre, surchargé de commandes, non seulement à Venise et en Vénétie, mais aussi en Allemagne et en Espagne, toujours sur les routes et sur les chantiers, Giambattista Tiepolo n'avait guère le temps de se livrer à l'examen de soi-même. En avait-il seulement le goût? Ce n'est pas impossible, contrairement à ce que l'on pourrait croire au premier abord. Il s'est plus d'une fois représenté lui-même, figure discrètement glissée dans les foules nombreuses dont il peuplait ses fresques. Tenons compte aussi de la part, non pas secrète, mais peu spectaculaire de ses travaux que sont les dessins de paysage et les estampes à sujets bizarres où s'agitent des magiciens et des polichinelles.

Peintre à succès d'une ville, Venise, dont l'une des principales ressources consistait à se donner en spectacle au monde et qui masquait le déclin de sa puissance sous le faste de cérémonies surannées, Tiepolo laisse souvent percer, sous l'orchestration triomphale de ses compositions, les accents ténus d'un humour mélancolique. Son fils Giandomenico, collaborateur zélé d'un père qu'il a secondé dans toutes ses grandes entreprises dès qu'il fut en âge de le faire, a, dans ses oeuvres personnelles, donné plus de place encore à ce goût d'observation ironique de la vie quotidienne que l'on retrouve à la même époque chez Goldoni.

La vie de Tiepolo est une vie de travail, mais son cours paisible se déroule sur le fond angoissant d'une civilisation en train de tomber en ruine, celle de la république de Venise au XVIIIe siècle.

Georges Brunel, ancien élève de l'Ecole normale supérieure, agrégé des Lettres, est conservateur en chef des musées de la Ville de Paris.