Marc Angenot est professeur de lettres à l'Université McGill de Montréal. Il a été nommé en 2001 à la Chaire James McGill d'étude du discours social. Il est membre de l'Académie des lettres et des sciences humaines, l'une des trois composantes de la Société Royale du Canada. Le Prix du Québec «Léon-Gérin »lui a été décerné en 2005 pour l'ensemble de son oeuvre. Le Prix des sciences humaines André-Laurendeau lui a également été décerné en 1996.Ses domaines de recherche sont l'analyse du discours, l'histoire des idées politiques et sociales, la rhétorique et la théorie du raisonnement et de l'argumentation. Abondamment citée et commentée, cette oeuvre a fait l'objet en 2004 d'un numéro du Yale Journal of Criticism, Marc Angenot and the Scandals of History, dirigé par Robert F. Barsky. Les premiers livres de Marc Angenot ont porté sur les marges de la littérature. Le Roman populaire (1975) aborde les genres paralittéraires du xixe siècle entre Les Mystères de Paris et Fantômas. Auteur de plusieurs études sur l'utopie et la science-fiction, Angenot fut, entre 1978 et 1984, co-directeur de Science-Fiction Studies, qui était et demeure la seule revue savante internationale en ce domaine. Dès cette époque, Marc Angenot travaille à la reviviscence de l'ancienne rhétorique dans le cadre des méthodes nouvelles d'analyse des textes. La Parole pamphlétaire, ouvrage publié chez Payot en 1982 et régulièrement réédité, constituait une percée dans l'analyse négligée des genres polémiques. Les Champions des femmes (1977) examine pour sa part une vaste tradition galante qui, entre 1400 et 1800, démontre à grand renfort d'exempla et de preuves topiques la supériorité du sexe féminin. Critique de la raison sémiotique, fragment avec pin up (1985; traduit en anglais, Critique of Semiotic Reason) procède à une critique systématique des théories sémiotiques de Charles S. Peirce à Umberto Eco. Marc Angenot s'emploie à développer à cette époque unethéorie du discours social. Il s'agissait de construire une problématique et une batterie de concepts susceptibles de rendre raison de latotalité de ce qui s'imprime et se diffuse dans un état de société. De ce projet sortira un ouvrage de mille deux cents pages, analyse en coupe de l'imprimé français au cours d'une année entière et exposé de ladite théorie, Mil huit cent quatre-vingt-neuf : un état du discours social, 1989. À l'ouvrage principal s'adjoindront quatre autres livres, développant certains aspects de la question : Le Cru et le Faisandé : sexe, discours social et littérature, Bruxelles, 1986 ; Le Centenaire de la Révolution, Paris, 1989 ; Ce que l'on dit des Juifs en 1889 : antisémitisme et discours social, Paris, 1989. On a enfin sur la publicité en France au tournant du siècle, L'OEuvre poétique du Savon du Congo, Paris, 1992. La théorie du discours social sert aujourd'hui de référence à de nombreux chercheurs dans les Amériques et en Europe. Au cours des années 1990, la réflexion d'Angenot s'est orientée vers des questions de philosophie politique et vers l'histoire des militantismes progressistes et de ce qu'il analyse comme les Grands récits. Ses nombreux livres en ce domaine font de Marc Angenot un des premiers spécialistes de l'histoire des idéologies modernes, particulièrement, de l'histoire du socialisme. L'Utopie collectiviste, paru aux PUF en 1993, traite de la représentation de la société censée sortir de la révolution, vue par les leaders et les propagandistes de la Deuxième Internationale. La Propagande socialiste, 1997, est un recueil d'essais portant sur la même époque du mouvement ouvrier européen. L'Antimilitarisme : idéologie et utopie, 2003, étudie ce puissant mouvement dans l'extrême gauche d'avant 1914. Enfin, La Critique au service de la révolution, Louvain et Paris, 2000, analyse la critique littéraire et artistique communiste des années 1930. Vers la fin des années 1990, Marc Angenot va étendre sa réflexion en remontant à la critique sociale romantique et aux socialistes utopiques. De la prise à bras le corps des deux siècles de la modernité politique, sortent quatre nouveaux ouvrages : Colins et le socialisme rationnel, 1999, qui porte sur le plus oublié des faiseurs de Grands Systèmes du xixe siècle et sur ses disciples, les « socialistes-rationnels ». Les Grands Récits militants, religions de l'humanité et sciences de l'histoire, Paris, 2000, analyse les modes de légitimation des idéologies du progrès dans la modernité séculière. La démocratie, c'est le mal examine, comme l'indique le sous-titre, un siècle d'argumentation anti-démocratique à l'extrême gauche, 2004. Paru en 2004 aux Presses de l'Université Laval, Rhétorique de l'anti-socialisme, essai d'histoire discursive 1830-1917 porte sur un siècle de polémiques en Europe contre les idées et les projets socialistes.Récemment enfin, Marc Angenot a livré une synthèse intitulée Le Marxisme dans les Grands récits, Québec et Paris, 2005 ; c'est une étude, non de la pensée de Karl Marx, mais du « socialisme scientifique » en tant qu'orthodoxie et objet de foi absolue entre la Commune et la Grande Guerre. La réflexion d'Angenot a porté aussi à quelques reprises sur la culture contemporaine. Les Idéologies du ressentiment (1996) sont une critique des nationalismes et des communitarismes, critique qui a fait grand bruit. D'où venons-nous, où allons-nous? (2001) est un essai sur la décomposition de l'idée de progrès et sur les transformations du paysage idéologique en Occident depuis la chute du Mur de Berlin. Marc Angenot a également dirigé divers ouvrages collectifs. On citera avant tout la monumentale Théorie littéraire, problèmes et perspectives (PUF, 1989 ; ouvrage traduit en chinois, en espagnol, en grec moderne et en portugais). Marc Angenot a fondé en 1988 et dirige la revue Discours social qui s'est transformée en 2001 en une collection de monographies et de travaux collectifs publiés sous l'égide de la Chaire James-McGill. Vingt-neuf volumes de cette deuxième série ont paru. Marc Angenot a contribué par des chapitres, des études et des préfaces (il vient notamment de préfacer la réédition de Les Romans de l'homme-singe de Régis Messac, Paris, Ex Nihilo, 2007) à près decent ouvrages collectifs parus en Amérique et en Europe. Il a publié plus de cent vingt-cinqarticles dans des revues scientifiques. Certains de ces articles ont été traduits en anglais, en portugais, en arabe, en chinois et japonais. Il a enfin fait au cours de sa carrière plus de cent cinquante communications dans des colloques et de nombreuses conférences au Canada et à l'étranger. Il fait partie de plusieurs centres de recherche et des comités de rédaction de revues savantes de par le monde. Il a été invité à enseigner au cours des années dans des universités du Canada, du Brésil, d'Argentine, d'Israël, de Belgique et de France. Marc Angenot termine actuellement, en collaboration avec Régine Robin, une recherche sur « L'instrumentalisation du passé : l'idéologie contemporaine aux prises avec le xxe siècle » et entame un nouveau projet qui fait suite, « Effacements et oblitérations: enquête sur les régimes d'amnésie et de réfection du passé des sociétés contemporaines ». Il travaille dans ce cadre à une étude sur Les Religions séculières : un concept pour le xxe siècle, étude qu'il compte achever en 2008. Marc Angenot a organisé et présidé aussi dans ce même cadre, les 16 et 17 novembre 2007, un colloque international sur La loi, la mémoire et l'histoire. Il vient de faire paraître un traité de rhétorique de l'argumentation, Dialogues de sourds : traité de rhétorique antilogique, aux Éditions Mille et une Nuits.copyright photo : Jean-Guy Thibodeau